Julien Nédélec
samedi 29 janvier 2011
samedi 29 janvier : Julien Nédélec
Les très bas reliefs
Montage : de 10 h à 18 h
Démontage : 20h30 à 21 h
Deux escabeaux sont tout d’abord installés, puis de grand lés de papier blanc de 1 mètre de large sont déroulés verticalement sur toute la surface des murs, scotchés en haut, et flottant en bas, légèrement recourbés sur eux-mêmes. Plus un centimètre carré de la salle n’est visible derrière ce rideau vierge. Quatre personnes se mettent au travail pour réaliser un frottage géant : le papier est irrégulièrement grisé, laissant apparaître les aspérités, les trous, les marques des rebouchages passés. Julien Nédélec emprunte cette technique élémentaire de recouvrement du réel, ce degré zéro du dessin afin de situer son intervention au présent, comme un entre-deux révélé de l’histoire du lieu. Entre toutes les expositions passés qui ont déposé leurs traces et toutes celles à venir qui rendront son relevé obsolète. Le frottage lui permet de reproduire avec efficace l’espace à l’échelle 1 et de transférer aux murs et à l’empreinte des œuvres qu’ils ont portés, le vouloir qui est d’ordinaire le propre de l’artiste. C’est comme si l’on faisait parler les murs, comme si la caresse systématique et aveugle du graphite réanimait la mémoire du lieu, le révélant à lui-même et au visiteur.
Ce qu’indique également l’œuvre de Julien Nédéléc, c’est le phénomène du lieu d’exposition dont les murs voient continuellement apparaître et disparaître des objets, des signes, des images, c’est le cube blanc dont la « neutralité » apparente permet que se succèdent des œuvres qui le transforment invariablement. Par son accélération, cette transformation semble se jouer sous nos yeux, l’accumulation du temps et des souvenirs d’œuvres devient une matière vive.
On essaie généralement de lisser ces cicatrices laissées dans les architectures muséales, car elles pourraient s’avérer d’encombrantes signatures. Comme dans Plutôt que rien : démontages, on s’efforce de rendre une virginité à l’espace en guise de condition d’apparition de l’œuvre nouvelle. La proposition de Julien Nédélec fait affleurer l’impossibilité de ce palimpseste.
Il serait intéressant de refaire l’expérience à la fin de l’exposition, cependant, il est tout aussi signifiant de poser cet acte à une étape quelconque de son déroulement, car il démultiplie l’échelle de temps au-delà de sa durée propre. Ce sont toutes les expositions, toutes les œuvres présentées depuis le début de l’histoire du centre d’art et, par symétrie, celles qui viendront ensuite jusqu’à sa disparition, qui existent simultanément dans ce dessin gigantesque.
De ce dernier qu’il découpera en une multitude de pages, Julien Nédélec a décidé de faire un livre, édition unique dont la réalisation est reportée à une date ultérieure, comme un dépôt sans terme de l’action « one-shot » menée à la Maison populaire.